Cet argument, déjà utilisé, et fondamentalement LE maître argument de ton propos, me chagrine parce qu'il est, d'une part mal fondé, d'autre part méprisant. Méprisant parce que mal fondé.
En effet, et ici sans mépris, je voudrai rappeler qu'une "trahison", une "transformation" ou tout ce qu'on veut accepte des degrés. Je ne pense pas avoir besoin de l'expliciter mais pour faire simple nous reconnaîtrons aisément tous que ton apparence physique sera moins modifiée si nous retirons à vie un sourcil que si nous retirons à vie un bras. De la même manière qu'on peut dire que se tromper d'une année quand on établit l'âge d'une personne est une moins grande erreur que si on se trompe de dix années, on peut également voir des degrés de "trahison" dans l'oeuvre éditoriale d'une réédition dans une nouvelle langue. Qui dit réédition dit modification, qui dit traduction dit trahison. Cela n'est pas nouveau et chaque individu ayant fait un minimum de linguistique le saura amplement.
Pour autant, la part de degré est important.
Sh@dow, comme moi, demandons le moins de trahison possible en acceptant, que par son essence, la VF en contiendra. Toi tu nous réponds "vu qu'il y en a, vous devez toute l'accepter". L'idée derrière ta position, pour être tenable serait que soit on en accepte aucune (et cela est impossible par définition : il faudrait, pour vivre l'expérience originelle, revenir lors de la date de sortie du comics pour vivre sa parution mensuellement, et découvrir l'histoire en même temps que le reste du public, rien que l'écart temporel trahit l'expérience originelle) soit, dès lors qu'on en accepte une, on doit les accepter. C'est littéralement le fond de ton propos qui repose sur ce qu'on pourrait appeler un principe de cohérence : accepter une modification est identique à en accepter deux, etc. jusqu'à donc les accepter.
De cela naît une incohérence évidente : on peut alors accepter une oeuvre totalement différente de l'originelle. Imaginons que Urban ait décidé d'éditer une seule version de ce comics où nous aurions le script originel mais totalement redessiné par un dessinateur français. Selon ton point de vue, nous devrions accepter, encore plus si le but est de valoriser le scénario et non le dessin. Nous pourrions dire exactement le même argumentaire que toi et tu vois pourtant aisément que cette situation serait ubuesque. Ta position conduit à accepter des modifications extravagantes d'une oeuvre.
Le second point est le point méprisant de ton argument. Je ne pense pas qu'il soit fait volontairement méprisant parce que, de ce que je lis de tes posts sur ton forum, ce n'est pas ta façon de penser. Mais ici on tombe dans une vision qui consiste à "imposer une lecture au lecteur" et cela me dérange. Je suis, pour ma part, lecteur très majoritairement VO. Je ne lis de la VF que lorsque je veux lire un event regroupé plus aisément en VF, profiter d'un nouveau regard sur une histoire déjà lu en VO, prendre un récit que je galère à trouver en VO, ou soutenir un éditeur français faisant une belle parution. Et Swamp Thing : La Légende entrait dans la dernière catégorie. Un lecteur VF a le droit, comme je le soulignais avant, de prétendre à un degré minimale de modification du contenu, modification qui n'est pas du tout minimale ici puisqu'on enlève un quart de chaque planche !
Or, dire "lisez de la VO" c'est omettre trois choses 1) le prix du single, qui va forcément limiter l'accessibilité, 2) l'aisance d'obtention de la VO. Toute une partie du public français qui n'achète pas sur internet n'a pas accès à la VO. 3) la lecture en anglais, parfois difficile pour certains lecteurs.
Or ici, dans ton propos, on retrouve vraiment une idée qu'on devrait bien être content des efforts que Urban fait et que si on n'est pas content on ne lit pas de VF.
Cela me gène, comme le fait que ton argumentaire omette totalement la question de "degrés de modification" me dérange aussi.
Et comme on l'a tous dit : si ce n'était pas la première édition qu'en faisait Urban, l'idée serait très bonne, le soucis ici est que c'est la seule qu'il propose.
Quant au propos de la communication, je ne vais pas entrer dans le débat mais la base même de la com' se fait de l'entreprise vers le public et non du public questionnant l'entreprise, c'est à peu près ce que les écoles de com' voient dès la première semaine.